Voyage à Madagascar

Antananarivo


Photographie Jacques Nicolin

« Bienvenue à Tananarive, puisqu'il y a de grandes chances que vous arriviez à Madagascar par ici. Tana, pour les intimes ! Pas facile, d'ailleurs, d'être intime avec Tana au premier coup d'œil. À l'origine, la ville a été bâtie sur 12 collines sacrées, chacune étant détenue par un roitelet différent. Aujourd'hui, le Grand Tana s'étend sur 18 collines, ce qui lui donne une topographie pour le moins tortueuse qui n'est pas pour nous déplaire. Tana, ses toits de tuiles, ses vieilles bicoques couleur rouille, sa Ville Haute et sa Ville Basse, et puis ... ses embouteillages, sa pollution et ses gosses dans les rues.

Comme toutes les capitales des pays du Tiers Monde, Tana attire son lot de misère. Vous voici débarqué dans la capitale d'un pays subtilement métissé entre Afrique et Asie, avec cependant une goutte d'Asie plus prononcée sur le Visage des Merinas, l'ethnie de la région. Mais des Malgaches de tout le pays composent la mosaïque ethnique de la capitale: marchands en tout genre, chauffeurs de taxi, vendeurs de cigarettes, de journaux ou de bric à brac, et mendiants.

Du haut de ses collines sacrées, Tananarive domine le pays et d'abord l'Imerina avec ses paysages de collines déboisées et ses petits villages traditionnels composés de jolies maisons de pisé. C'est aussi la région la plus froide de Madagascar, où l'hiver austral porte bien son nom. L'ancienne ville thermale d'Antsirabe, aux portes de Tana, est un havre de fraîcheur pendant les grosses chaleurs. Dans le Betsileo, d'Ambositra à Fianarantsoa, le paysage est particulièrement marqué par ses collines sculptées de rizières en terrasses. Tout pousse ici, carottes, asperges, pêches, pommes, jusqu'aux vignobles à flanc de coteaux! Le Betsileo constitue le carrefour entre l'imerina, où ! l'on atterrit, et les régions côtières du Sud, vers lesquelles on émigre au soleil. Mais ce n'est déjà plus l'imerina : plus tarabiscoté, plus vert, plus frais peut-être également, le Betsileo se présente aussi politiquement et culturellement comme un intermédiaire entre Tana et le Sud » .

Extraits du Guide du Routard - Hachette



« Le jour ne s'est pas encore levé sur Tananarive. Des convois de charrettes tirées par des zébus passent bringuebalantes du côté du lac d'Anosy. Poulets et canards embarquent. Sur la route de la digue, des groupes de villageois marchent en silence courbés sous le poids de sacs. La lumière et une lampe à pétrole sur la table d'une gargotte de plein air laisse apercevoir des hommes attablés autour d'assiettes pleines de riz. L'activité est là, furtive, silencieuse. Peut-être même a-t-elle duré toute la nuit au long des chemins tortueux et boueux des quartiers périphériques de Tana. Les premières lueurs roses de l'aube s'accrochent aux flancs des collines de l'Imerina, «le pays d'où on voit de loin». Les façades des étroites maisons de briques de latérite dévoilent peu à peu leur couleur ocre-rouge tandis qu'une lumière exceptionnellement belle inonde lentement le ciel, illumine les crêtes des collines qui entourent Tananarive. La plaine de Betsimitatatra s'étire, dominée par la falaise d' Andohalo; le patchwork des rizières scintille à tel point qu'on al' impression que les rizières pénètrent au cœur de la capitale, car on ne voit plus que du vert et du rouge. Un des visages de Tana, c'est celui d'une capitale à la campagne.

Tananarive n'est pas une ville banale. On la voit à la lueur de sa propre sensibilité. Tragique mais poétique, aussi délabrée que lumineuse, plutôt asiatique, mais pas exotique, toujours imprévisible, parfois insupportable, Tana déconcerte, peut mettre mal à l'aise. Elle est aux antipodes d'une capitale bétonnée, plate et insipide, surgie de la modernité. Ville rouge, pleine d'escaliers, de dédales de rues défoncées qui grimpent, dégringolent, dans un désordre qui rend les repères illusoires, elle est un défi à l'urbanisme moderne. C'est peut-être ce qui lui donne son cachet. Il vaut mieux tenter de s'y repérer par quartier, car la recherche des noms de rues, fréquemment rebaptisées en malgache, est souvent peine perdue.

Tananarive, «la ville aux mille villages », a une âme vieille de trois cents ans. Berceau de la royauté merina, son cœur battait alors au sommet de ces collines où ont été édifiés les palais royaux; collines qui se sont couvertes peu à peu de maisons de bois au toit de chaume dans une douce anarchie de ruelles alambiquées, mal pavées. Puis la ville finit par déborder de son enceinte en s'étendant sur les plaines marécageuses environnantes. Si le haut Tananarive d'hier, résidentiel aujourd'hui, est toujours plein de charme, en particulier dans l'inertie du dimanche après-midi, en revanche la ville basse, et les quartiers chaotiques, les bidonvilles qui la jouxtent, parlent d'un présent difficile, pesant, où mendier est devenu le métier d'enfants qui vivent pieds nus, où fouiller les poubelles un art pour des familles dans le dénuement le plus complet.

Avec son air provincial, Tana ne fait pas l'effet d'une mégalopole. Pourtant, la croissance de la population de Tananarive a été plus forte que dans bon nombre de villes dites tentaculaires: plus d'un million d'habitants aujourd'hui contre 50000 habitants en 1930. Attrait mythique de la capitale, manque de travail en province, l'exode rural continue en dépit des efforts de décentralisation. Se loger décemment est un luxe à Tana. Avoir une voiture, un privilège inaccessible à la majorité. Et pourtant, le parc automobile a décuplé depuis 1986-87, années où l'économie se libéralisait, où les échanges avec l'extérieur reprenaient.

Sous le tunnel Garbit, témoin de l'époque coloniale et qui relie l'avenue du 26-Juin et le lac Anosy, l'atmosphère est étouffante; les seuls qui parviennent à avancer sont les piétons. Les embouteillages font désormais partie du quotidien de ceux qui viennent travailler à Tananarive. Cent quarante mille voitures dans la région, débarquées souvent de France et surtout de la Réunion, véhicules d'occasion, voire en pièces détachées... Marché juteux pour les revendeurs d'engins parfois bons pour la casse, mais que les Malgaches, bricoleurs de génie, finissent par remettre sur pied avec les moyens du bord. Les moteurs vrombissent, fument, prêts à rendre l'âme; les portes tiennent avec des ficelles. Années soixante en vedette avec les 404 de papa, les bonnes vieilles deux-chevaux rafistolées mais toujours guillerettes qui crachotent en montant les lacets des collines, suivies par les 4L increvables qui se transforment en taxis. Vu les conditions économiques, leurs chauffeurs en sont plus souvent locataires que propriétaires! Et au milieu de ce tohubohu automobile à bout du souffle, un signe extérieur de richesse, les 4x4 flambant neufs ont fait une apparition récente mais évidente. Tananarive n'est pas à un contraste près».

Extraits de Découverte Madagascar - Guides Olizane

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